Les gestes de la Messe

Les gestes et les attitudes qui disent la foi !

 

Après que nous ayons découvert les différents moments de la messe, je vous propose, maintenant, de découvrir les différents signes qui disent la foi de ceux qui participent à la messe.

Dans la célébration liturgique, toute la personne est engagée et les gestes qu’elle pose revêtent autant d’importance que les mots, les chants, les silences. C’est un ensemble d’éléments variés qui fait accéder au mystère et entrer en relation avec Dieu. Qu’ils soient posés par l’assemblée ou par tel ou tel acteur de la liturgie, les gestes portent une intention de l’Église ou révèlent une attitude personnelle. Bien entendu, il ne s’agit pas de sombrer dans le ritualisme qui, parce que le geste devient automatique et déconnecté de l’intention, le réduit à sa plus simple expression et finit par en tuer la puissance symbolique et spirituelle. Il s’agit de regarder le sens de ces petits gestes de la liturgie, gestes parfois inaperçus ou négligés, pour en retrouver le sens et la portée spirituelle.

J’ai retenu six signes essentiels : se signer avec l’eau bénite ; se frapper la poitrine ; se signer avant l’évangile ; joindre ou ouvrir les mains ; l’imposition des mains et le fait de prier avec le corps. Nous terminerons notre petit parcours en découvrant que tous ces gestes qui disent la foi ont toute leur place dans la liturgie.

Cette semaine faisons mieux connaissance avec le premier de ces signes : se signer avec l’eau bénite.

1 – Se signer avec l’eau bénite :

Le premier et sans doute le plus familier de ces gestes est le signe de Croix. Souvent nous le posons en arrivant à l’église en nous signant avec un peu d’eau bénite… Le geste est loin d’être anodin. Il ne s’agit pas de marquer distraitement quatre points de son corps, mais de tracer la Croix avec l’eau bénite, comme un double rappel du baptême. Ce jour-là, le premier signe tracé sur notre corps fut le signe de la croix ; puis l’eau baptismale nous baigna. Quatre points de notre corps ainsi marqués nous rappellent que la Croix du Christ est l’instrument de notre salut et que, depuis notre baptême, nous avons revêtu le Christ. Le calme avec lequel nous posons ce geste, la manière dont nous le déployons lui donnent tout son poids. Nous aurions à retrouver ce geste, si nous l’avions oublié, d’autant qu’il aidera à percevoir l’église comme un lieu autre, habité d’une mémoire, celle du baptême et d’une présence mystérieuse, celle du Christ dont la Croix nous sauve.

Ce signe de la croix ouvre toujours nos célébrations. Ce geste nous identifie et dit clairement au nom de qui nous sommes rassemblés.

Mais d’où vient cette pratique du signe de la croix, cette croix tracée sur nous par quelqu’un ou par nous-même ? Dès le 2e siècle sa présence est attestée. À l’origine il s’agit d’abord d’une petite croix tracée sur le front des catéchumènes. Le signe est donc en lien direct avec le baptême. Saint Augustin dira que « c’est la marque des soldats du Christ ».

À partir du 8e siècle, dans les Églises byzantines d’abord, puis dans l’ensemble des Églises de la chrétienté, le large signe tracé sur nos corps qui nous est si familier se généralise. Il s’accompagne alors d’une profession de foi en la Trinité. Le signe de croix exprime ce qui constitue le cœur et l’ossature de la foi. Il en offre comme un condensé. Posé avec foi et respect, le signe de la croix est aussi une manière toute simple mais combien expressive de prier.

2 – Se frapper la poitrine :

Le geste est moins courant qu’à certaines époques ; la liturgie de la messe nous le propose pourtant à plusieurs reprises. Il ne s’agit pas de toucher son vêtement du bout des doigts, mais de se frapper la poitrine, le poing serré. Pourquoi la poitrine ? Parce que c’est le lieu vital du cœur et du souffle, le centre de l’être vivant. Il s’agit d’un geste de désignation, comme si l’on s’accusait en disant : « C’est moi ! » Il manifeste publiquement que l’on se reconnaît pécheur. Ce n’est pas un geste anodin ; il doit nous toucher le cœur, ébranler nos attitudes et nos choix de vie. Il nous réveille de nos léthargies et nous fait choisir Dieu.

3 – Se signer avant l’évangile :

Voilà un geste trop souvent accompli mécaniquement à tel point qu’il devient dérisoire et perd toute signification. Son sens mérite d’être connu. C’est un beau geste dont on peut résumer le sens par la formule suivante : « Que cet évangile pénètre mon intelligence pour que je le comprenne, ma bouche pour que je le proclame, ma poitrine et mon cœur pour que j’en vive et que je l’aime ». Le triple signe de Croix sur le front, les lèvres et la poitrine dit la manière dont nous avons à recevoir la Parole de Dieu.

4 – Joindre et ouvrir les mains :

Dans la vie courante, nos mains reflètent souvent nos émotions, nos attitudes intérieures, nos sentiments et nos désirs. Elles ne sont pas qu’utilitaires. Il en est de même dans la liturgie où elles ont leur propre langage, même s’il s’agit de gestes traditionnels de la société civile, gestes repris par la liturgie. À l’époque féodale, joindre les mains était un geste d’allégeance. Jointes, avec parfois les doigts croisés, les mains invitent au recueillement intérieur et à la vénération de Dieu, à l’union intérieure avec Lui. Si elles entraînent une attitude hiératique ou rigide, les mains jointes détournent le sens du geste.

Quant aux mains ouvertes, souvent levées vers le ciel, elles retrouvent une coutume de la prière chrétienne et signifient l’accueil et le don. Des peintures découvertes dans les catacombes témoignent que cette attitude était celle du prêtre à l’autel. Ce geste, beaucoup de chrétiens l’on adopté. Il accompagne la prière du Notre Père mais aussi très souvent la prière personnelle.

5 – L’imposition des mains :

Un autre geste souvent utilisé est celui de l’imposition des mains. On le retrouve dans la célébration de tous les sacrements. Pour les chrétiens, il s’agit là d’un signe de bénédiction, de guérison ou de consécration.

Le geste est bien connu tant dans l’ancien que dans le Nouveau Testament. Il est généralement associé à un don. Dans l’évangile on voit souvent Jésus toucher les malades en leur imposant les mains. Ils retrouvent ainsi la santé. L’Esprit Saint est donné en imposant les mains.

Le cas particulier du geste des deux mains tendues et posées sur le pain et le vin à l’Eucharistie, sur le prêtre ordonné, le confirmé, le pénitent, le couple qui reçoit la bénédiction nuptiale, le baptisé ou le malade qui recevra l’onction, a ceci de spécial qu’il évoque le vol d’une colombe.

Le geste solennel de l’imposition des mains n’est pas alors sans rappeler que l’Esprit du Ressuscité est invoqué et rendu présent. C’est lui qui sanctifie et consacre.

6 – Prier avec son corps :

Dans la prière chrétienne tout le corps est sollicité. Il en est ainsi lorsque nous célébrons l’Eucharistie. Le fait d’être à genoux, debout ou assis nous est familier. Ces attitudes les plus fréquentes aident tout notre être à entrer en prière. Chacune a une fonction particulière.

Ainsi être à genoux est l’attitude par excellence du pécheur. Dans l’agenouillement on s’abaisse le temps de reprendre cœur. Mais c’est aussi celle de la prière personnelle ou de l’adoration (le sens est d’ailleurs le même puisque le mot vient du latin ad-orare et veut dire prier vers….

Par ailleurs l’attitude première d’une assemblée qui célèbre l’Eucharistie est d’être debout. C’est la posture naturelle de celui qui rend grâce. Elle invite tout naturellement à la louange.

Pour l’écoute, afin de la favoriser, l’assemblée est assise, mais avec tout de même une exception. L’accueil de l’Évangile se fait debout. Une Bonne Nouvelle n’invite-t-elle pas à la louange et aux joyeuses acclamations ? C’est tout spontanément qu’une assemblée devrait se lever quand retentit le chant de l’alléluia.

Des gestes qui aident les chrétiens à habiter la liturgie comme lieu de rencontre de Dieu et de son peuple.

Tous ces rites pourraient passer pour dérisoires. Pourquoi y prêter attention ? Parce que tous les rites de la liturgie, si simples soient-ils, tracent un itinéraire indispensable à la rencontre des autres et de Dieu. Tous ces petits rites nous font passer d’une attitude à l’autre, d’une situation à une autre.

Baptisés, nous suivons le Christ dans sa Pâque ; nous passons avec lui de la mort à la vie. Et nous empruntons l’itinéraire rituel que propose l’Église, un itinéraire dont il convient de saisir les étapes et le sens pour aboutir à la rencontre du Christ. Sur cet itinéraire, tous les gestes ont leur place et un sens.

De plus, la liturgie est un acte de l’Église, un acte qui nous fait passer d’un statut individuel au statut de membre du Corps du Christ. Poser ensemble tous ces gestes, vivre ensemble les mêmes attitudes participe fortement à la construction de l’Église. Si les gestes sont humbles, parfois peu visibles, ils revêtent toute leur importance dans leur réalisation.

Leur redonner du sens ne peut qu’aider les chrétiens à habiter la liturgie comme lieu de rencontre de Dieu et de son peuple. Nous avons intérêt à relire régulièrement tous ces gestes pour qu’ils demeurent ajustés et harmonieux. Ils participent à la beauté de la liturgie.